Les mirages de la relation client


Du savoir faire au savoir être relationnel

La relation client semble être devenue aujourd’hui l’enjeu ultime des stratégies marketing et commerciales. Tous les opérateurs n’ont que ce mot là à la bouche : la relation client ! Que ça soit dans leur slogan, dans la signature de leur marque, dans leurs spots publicitaires, la relation client est partout. Et pourtant si la relation client est incroyablement présente dans les discours, elle n’a jamais semblé autant absente dans la réalité. Meilleure illustration de ce fait : il devient quasiment impossible de trouver un numéro de téléphone direct pour entrer en contact avec un opérateur. Le point de passage obligé, ce sont ces fameux numéros commençant par 0800. Des numéros qui condamnent les clients à passer par une plateforme téléphonique impersonnelle et subir les réponses « scriptées » de téléconseillers ou de vendeurs.

Eh oui, le problème, c’est que même si la relation client est un enjeu stratégique, elle coûte très cher. La plupart du temps, la relation client est d’abord pensée comme un coût. Un coût qu’il faut limiter au maximum et bien souvent externaliser. Plus grave encore, la relation client est parfois même pensée sans client. Qui n’a jamais fait l’expérience très désagréable d’entrer dans un magasin et d’avoir l’impression de déranger les vendeurs ? Qui n’a jamais fait l’expérience de se heurter à un mur et de n’être considéré que comme un « tiroir-caisse » dans sa relation avec une enseigne ? Pour se convaincre de cette triste réalité, il suffit d’ailleurs de se promener sur les réseaux sociaux et de lire les commentaires des consommateurs. Le service client fait très souvent l’objet de critiques acerbes, que l’on parle d’un opérateur téléphonique, d’une banque ou d’une enseigne commerciale.

Mais tout cela part peut-être d’un malentendu entre les entreprises et leurs clients. Dans les faits, il faut bien prendre conscience par exemple que la relation entre client et vendeur (1) semble avoir été totalement remise à plat. Le statut de vendeur est aujourd’hui « attaqué » sur 3 fronts sans que les entreprises en aient toujours tiré toutes les conséquences. La première attaque concerne l’utilité même du vendeur qui est en partie remise en cause. A l’heure du « consommateur expert » et des sites de comparaison et d’information sur Internet, le vendeur a clairement perdu de sa superbe. Historiquement, ce qui différenciait le vendeur du client c’était que le vendeur disposait d’une très forte expertise. Ce temps est en partie révolu et l’écart entre vendeur et client sur cette expertise s’est réduit. Le vendeur ne peut désormais plus asseoir son positionnement uniquement sur la technicité que lui contestent en partie les clients. La deuxième attaque concerne la neutralité des vendeurs. Les clients sont de moins en moins naïfs. Ils savent que dans la plupart des cas, le vendeur va leur conseiller un produit en fonction de son intérêt propre et pas seulement en fonction des besoins du client. C’est tout le problème des modèles de rémunération des vendeurs à la performance qui ont contribué à rompre en partie le lien de confiance entre client et vendeur. Certaines entreprises ont vite pris conscience de l’enjeu et choisi de communiquer sur la neutralité de leur vendeur à l’image du Crédit Mutuel qui vante le fait que « ses conseillers ne sont pas rémunérés à la commission ». Mais est-ce suffisant pour rétablir la relation de confiance ? La troisième attaque est peut-être la plus symbolique d’une « crise sociétale » qui dépasse le cadre des relations commerciales. Elle concerne une remise en question de la bienveillance du vendeur. Le client ne se sent pas reconnu pour ce qu’il est et n’obtient pas toujours toute l’attention et toute l’empathie qu’il souhaiterait dans sa relation avec l’entreprise. Une partie de la réponse aux problèmes posés par un client échappe souvent à la meilleure technicité et se place sur un plan plus humain et relationnel. Qui n’a jamais eu l’impression de « tourner en rond » avec un service client obtenant des réponses techniques plutôt qu’une vraie solution à son problème qui ne « rentre malheureusement pas dans les cases » ? Sachant que le client pourra être tout de même satisfait même si la solution n’est pas trouvée à condition de « sentir » le vendeur ou le téléconseiller vraiment concerné par son problème et faisant preuve d’empathie. Plus que des réponses à tous les problèmes, les clients attendent aussi de l’écoute et de la compréhension dans la relation avec les entreprises !

Ces trois attaques ne sont pas simples à gérer pour les entreprises et posent tour à tour le problème de la formation technique mais aussi et surtout relationnelle des vendeurs ainsi que leur mode de rémunération. Elles doivent pousser les entreprises à repenser leur stratégie de relation client et à trouver un équilibre entre une nécessaire automatisation / standardisation de la relation client (pour en maîtriser le coût) et en parallèle la possibilité de réinjecter plus de relationnel dans la relation client (au détriment d’une recherche systématique de « productivité »). Il nous semble déjà que l’accent est trop souvent mis sur le savoir-faire des vendeurs plutôt que sur le savoir-être qui compte autant dans une relation client réussie. Souvent les clients souhaitent pouvoir co-construire la solution au problème (2) avec le vendeur dans une relation d’échange où l’expertise est partagée entre le vendeur et le client qui a fait l’effort de s’informer au préalable. Une relation client réussie s’apparente dès lors plus à un échange qu’à une simple transaction : les clients souhaitent de moins en moins être considérés comme « des tiroirs-caisses » mais plus comme des partenaires de la marque qui contribuent activement à la relation et aux produits (3). Il semble également nécessaire de repenser les organisations et les process des dispositifs de relation client et de poser d’autres critères de performance interne pour éviter l’écueil de la « déshumanisation » de la relation client (4).

Pour conclure, Oui la relation client est l’enjeu majeur des prochaines années surtout dans un contexte où la fidélisation des clients devient plus stratégique que la conquête (5). Les entreprises ne doivent plus seulement envisager la relation client comme un coût qu’elles doivent systématiquement limiter mais plutôt comme une fonction essentielle à maîtriser et à mettre au service actif d’une stratégie efficace de fidélisation. Elles doivent pour cela certes évaluer le coût des dispositifs de relation client mais aussi évaluer ce que leur coûte une mauvaise relation client en termes de perte de clients, de réputation et de chiffre d’affaires potentiel…

Frank Benedic – ID Strat / Septembre 2014

(1) qui reste un des maillons essentiels de la relation client (ici le terme vendeur peut aussi recouvrir la notion de conseiller clientèle)

(2) que ça soit sur le choix du bon produit au moment de la vente ou pour la résolution d’un problème dans le cadre du SAV

(3) voir notre tribune sur les stratégies de marques relationnelles pour approfondir ce point

(4) on peut former ses vendeurs au relationnel client et créer les conditions pour qu’ils aient envie de satisfaire le client du mieux possible ou les obliger à sourire s’ils sont à « bonne distance » d’un client (« règle des deux mètres » chez un des leaders mondiaux du fast food : tout équipier croisant un client à moins de deux mètres doit lui sourire)

(5) voir notre tribune sur les stratégies de fidélisation pour approfondir ce point

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